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bâton d’exempt, et suivi comme ils le sont d’ordinaire, ayant remarqué que la chambre de Coustenan répondoit à la maison d’un marchand d’autour du Palais, alla chez cet homme, comme de la part du Roi, disant que les prisonniers se sauvoient par son logis. Le marchand dit qu’il ne s’y en étoit jamais sauvé : le chevalier répondit « qu’il vouloit aller partout, et qu’il vouloit être seul avec quelques-uns de ses camarades » (les autres demeurèrent en bas à amuser le marchand). Il monte, fait faire un trou à coups de marteau (ils avoient porté des marteaux sous leurs casaques), et sauve par là Coustenan, avec lequel il descendit, et puis le conduisit à Gros-Bois, où il s’accommoda avec ses parties. Le voilà de retour au Vexin.

Cette adversité ne le rendit pas plus sage : il fit comme auparavant ; mais il en fut bientôt payé. Il y avoit un paysan qui avoit une assez belle femme. Coustenan, non content de l’avoir violée, la fit fouetter dans une cave. Le paysan, plus sensible que ne sont ces sortes de gens, résolut de s’en venger, et voici comme il s’y prit. C’étoit à la campagne. Un soir qu’il savoit que Coustenan étoit retiré dans sa chambre, il monte avec une échelle à hauteur de la fenêtre, qui étoit, dit-on, au deuxième étage ; il avoit une arquebuse. Quand il se fut ajusté, il vit que Coustenan jouoit au piquet, à

    au château d’Ancy-le-Franc en Bourgogne, qu’une petite porte au lieu d’une porte cochère, en disant : « Si le Roi (c’étoit Henri IV) ne veut pas que j’entre chez lui en carrosse, il n’entrera pas non plus en carrosse chez moi. » La porte est encore comme il la fit faire ; et ses descendants n’ont garde de la faire agrandir, car ils sont fiers de conter cela. (T.)