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pas bon avec toute sorte de gens ; j’ai une petite inclination. » Cependant la pluie se passe, et notre avocat remonte à cheval ; comme il étoit un peu coquet, il avoit assez d’autres affaires. Il fut près d’un mois sans retourner chez la Cambrai : il la trouva tout aussi gaie, et, pour ne point perdre de temps, il la voulut mener sur l’heure dans l’arrière-boutique. « Tout beau ! lui dit-elle, mon mari est là-haut ; mais venez me voir dimanche, il n’y sera peut-être pas, et, s’il y étoit, vous n’avez qu’à demander un bassin d’argent de dix marcs ; il n’y en a jamais de faits de ce poids-là, et vous direz que c’est une chose pressée. » Qui s’imagineroit qu’un jeune garçon manqueroit à une telle assignation ? Patru y manqua pourtant ; il étoit amoureux ailleurs.

Quelque temps après, comme il étoit à Clamart, il sut que cette femme étoit à une petite maison qu’elle avoit au Plessis-Piquet. Il lui envoie demander audience pour le lendemain ; et tandis que toute la compagnie étoit à la grand’messe, il s’esquive, et à travers champs il galope jusque là. Il la trouve seule, et s’imaginoit déjà avoir ville gagnée ; mais il fut bien étonné quand cette femme, après lui avoir laissé prendre toutes les privautés imaginables, lui déclara que pour le reste il n’avoit que faire d’y prétendre. Il la culbuta par plusieurs fois ; il fit tous ses efforts ; il se mit en chemise ; il fallut enfin s’en retourner sans avoir eu ce qu’il étoit venu chercher. Un mois ou deux après, comme il passoit devant sa boutique, il la salua ; un gentilhomme, nommé Saint-Georges-Vassé, qui connoissoit Patru, étoit avec elle, et lui demanda en riant si elle connoissoit ce beau garçon. « Je le connois mieux