Page:Tallemant des Réaux - Les historiettes, tome 3.djvu/254

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

avoir été un moment en haut, elle dit à madame de Revel : « Qu’elle étoit montée plutôt pour savoir si elle la retrouveroit dans deux heures que pour lui faire une visite ; car, dit-elle, j’ai une affaire qui presse. »

Après elle descend et crie : Mes porteurs ; c’étoit le mot ; elle entre dans la chaise, va chez Rambouillet : on la porte jusque sur l’escalier, car l’appartement du galant répond sur le derrière, et est par bas. Il la caressa tant qu’il put. Dans le déduit il lui disoit : « Voilà le sang de Coligny bien humilié ! » Il dit qu’elle n’est point badine, et qu’elle ne lui sut jamais dire que : « Ah ! mon cher, que je vous aime ! » Il lui dit : « Qu’il ne lui avoit pas autrement d’obligation de ce qu’elle avoit fait pour lui, et que le comte Du Lude en avoit eu autant. » Elle souffrit cela sans se fâcher. Elle ne lui avoua pourtant rien, et lui dit seulement qu’en causant de l’amour avec sa belle-sœur de Nermanville, la pucelle lui disoit : « Mais, ma sœur, à vous ouïr, je pense que si vous vous trouviez avec un homme que vous aimassiez, vous lui permettriez toute chose. Peut-être, disoit-elle ; je n’en voudrois pas répondre. » Rambouillet fut quinze jours sans y aller : il lui dit qu’il y avoit été trois fois. Elle le crut bonnement, car on lui fait accroire tout ce qu’on veut ; mais il ne lui fit rien, et, ce qui est étonnant, ils se sont vus cent fois depuis, et elle n’a jamais fait semblant de se souvenir de ce qui s’étoit passé entre eux.

Un Saint-d’Hierry, fils de feu Roques, écuyer du cardinal de Richelieu, a été son galant ensuite. Les demoiselles se relâchoient, et tout alloit à l’abandon. De Vannes se tourmenta tant qu’il lui fit donner