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fais. » Elle lui confessa que le comte Du Lude en avoit tout eu ; depuis, elle le lui nia, et lui dit : « Que c’étoit un coureur qui avoit eu la v....., s’il ne l’avoit encore. » Mais ce que je sais de mieux, c’est ce qu’elle a fait à Rambouillet, celui qu’on appela depuis Rambouillet-Candale. Elle lui dit une fois qu’elle étoit entièrement persuadée de son mérite ; depuis elle lui écrivit cent extravagances. Il ne lui fit aucune réponse ; mais il y fut un jour qu’elle l’en avoit fort prié : elle étoit au lit. Elle fit si bien qu’en présence de ses demoiselles qui ne sortoient jamais de la chambre (elles étoient un peu espionnes), elle mit le rideau sur lui, de sorte qu’elle se fit voir à lui toute nue. Elle a le corps beau ; mais pour le visage il y a de la moue de son père.

Elle fut après pour le voir, et le pressa de se trouver en un lieu où ils pussent être en liberté. Lui, qui croyoit qu’il n’y faisoit pas trop sûr, et qui étoit engagé ailleurs, fut long-temps sans s’y pouvoir résoudre. Enfin il fallut pourtant cesser de faire le cruel : il n’alla point un dimanche à Charenton, et il s’assura de la cour de derrière du logis de son père. Après avoir fermé soigneusement toutes les fenêtres et toutes les portes qui donnoient sur cette cour, et avoir fait dire qu’il n’y étoit pas, il prit ensuite des porteurs affidés dont la chaise étoit marquée 20[1], et les envoya chez madame de Revel, veuve d’un avocat-général de Grenoble. Or, la comtesse devoit aller chez cette dame en chaise, et renvoyer tout son monde, faisant semblant d’y vouloir passer l’après-dînée ; ce qu’elle fit. Après

  1. Toutes les chaises ont leur numéro. (T.)