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dioux ! » Et Marion Cornuel[1] disoit : « Bœufs et Gassions, ce m’est tout un. »

Madame de Bourdonné[2], femme du gouverneur de La Bassée, du temps du cardinal de Richelieu, le pensa faire enrager. M. le comte de Harcour et lui dînoient à La Bassée ; cette femme se mit à parler des faits de Gassion. Déjà cela ne lui plaisoit guère ; il n’étoit point fanfaron. Ensuite, après en avoir demandé pardon à son mari, elle dit qu’elle n’auroit pas de plus grande joie au monde que d’avoir un fils de la façon d’un si brave homme. Le voilà qui rougit, qui se déferre, et ne pouvant plus endurer cela, il monte sur son grand cheval, en disant : « Mordioux ! mordioux ! cette femme est folle. »

Quand Bougis, son lieutenant de gendarmes, demeuroit trop long-temps à Paris l’hiver, il lui écrivoit : « Vous vous amusez à ces femmes, vous périrez malheureusement ; ici, vous verriez quelque belle occasion. Quel diable de plaisir d’aller au Cours et de faire l’amour ! Cela est bien comparable au plaisir d’enlever un quartier ! »

Pour le bien, il n’a pas volé ; mais il ne pouvoit se résoudre à perdre. Il fit dire à un marchand de Paris, qui lui fit banqueroute de dix mille livres avant qu’il fût maréchal, qu’il lui seroit impossible de laisser au monde un homme qui lui emporteroit son bien. Il fut payé. Avec tout cela, il n’avoit guère de revenu : les salines de Béarn, un engagement de douze mille livres

  1. Elle étoit fille du premier mariage de M. Cornuel. (Voyez plus bas l’article de madame Cornuel.)
  2. Elle avoit de la barbe. (T.)