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Vieuville, depuis surintendant des finances, lui donna son fils aîné pour lui apprendre le métier de la guerre. Ce jeune homme le traita à l’armée magnifiquement. « Vous vous moquez, dit-il, monsieur le marquis : à quoi bon toutes ces friandises ? Mordioux ! il ne faut que bon pain, bon vin et bon fourrage. »

C’étoit un des plus méchants courtisans de son siècle. À la cour, beaucoup de filles, qui eussent bien voulu de lui, le cajoloient et lui disoient : « Vraiment, monsieur, vous avez fait les plus belles choses du monde. — Cela s’entend bien, » disoit-il. Une ayant dit : « Je voudrois bien avoir un mari comme M. de Gassion. — Je le crois bien, » répondit-il.

Ségur, fille de la Reine, de la maison d’Escars, avoit quelque espérance de l’épouser, assez mal fondée pourtant, car elle n’étoit ni jeune ni belle. Lui disoit : « Elle me plaît, cette fille, elle ressemble à un Cravate. » À la vérité, il n’a jamais été d’aucune cabale ; mais il n’avoit point de discrétion pour le cardinal ; et un jour, sans considérer qu’il y avoit des espions autour de lui, il dit en recevant un gros paquet du cardinal : « Que nous allons lire de bagatelles ! » Aussi croit-on que le cardinal le vouloit perdre ou lui ôter son emploi.

Il avoit eu le malheur de se brouiller avec M. le Prince. Nous en dirons tout le particulier ailleurs : il n’étoit pas trop compatible et avoit le commandement rude : nous rapporterons des exemples.

Comme j’ai remarqué, il étoit fort sobre ; il n’étoit point joueur non plus, ni adonné aux femmes. « Femmes et vaches, disoit-il, ce m’est tout un, mor-