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cette bataille, dont il eut le plus grand honneur, dans les Mémoires de la régence.

À Thionville, comme il vit un siége[1] : « Ah ! dit-il, n’est-ce que cela ? » Et il comprit en peu de temps le métier d’assiégeur de villes : il y reçut une grande blessure à la tête, dont il pensa mourir.

On surprit une lettre de Francesco de Melo qui disoit : « Nous avons perdu Thionville, mais les ennemis y ont perdu Gassion, le lion de la France et la terreur de nos armées. » Cette lettre lui fut envoyée par la Reine à Bagnolet, où il achevoit de se guérir. L’hiver suivant il fut fait maréchal de France par le crédit de M. d’Enghien.

On dit que comme Gassion pressoit fort le cardinal Mazarin pour le bâton, le cardinal lui dit : « M. de Turenne, qui doit aller devant, n’est pas si hâté. — M. de Turenne, répondit Gassion, honorera la charge, et moi j’en serai honoré. »

Notre nouveau maréchal fit deux choses quasi en même temps qui ne se rapportoient guère, car il alla à la cène devant le prince Palatin, qui a épousé la princesse Anne, et le dimanche suivant ayant trouvé sa place prise, il ne voulut jamais souffrir qu’un gentilhomme en sortît, et alla chercher place ailleurs ; mais cela vient de ce qu’il n’étoit né que pour la guerre.

Il étoit tout l’hiver en Flandre, et ne venoit point comme les autres à la foire Saint-Germain. C’étoit peut-être un des hommes du monde le plus sobres. La

  1. Cependant il avoit été à Dole. Je crois que cela arriva à Dole au lieu de Thionville. (T.)