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chantoit fort bien, et qui vint à la cour du temps du cardinal de Richelieu. « Mon Dieu, disoit-elle à mademoiselle de Senecterre, que cet incommodé chante bien ! »

Ce petit Bertaut fait des vers, mais pas trop bien, et c’est un grand diseur de fleurettes. Quand la cour alla à Poitiers, en 1652, un nommé Du Temple, qui a la plus belle femme de la ville, et qui est fort jaloux, alla au-devant des fourriers, pour les prier de lui donner M. Bertaut ; il entendoit Bertaut l’incommodé ; mais il n’y étoit pas ; eux lui dirent : Volontiers. Il alla faire un tour je ne sais où, et quand il arriva chez lui, il trouva un petit jeune homme qui disoit des douceurs à sa femme.




LE MARÉCHAL DE GUÉBRIANT[1].


Le maréchal de Guébriant étoit de Bretagne, et bien gentilhomme. Il avoit étudié, et, s’il eût eu assez de bien pour cela, il auroit été conseiller à Rennes ; mais il n’avoit que deux mille livres de rente.

Un jour, étant à Paris, la nuit il entendit du bruit dans la rue, comme de gens qui se battoient ; il descendit, et, voyant un homme assez mal accompagné attaqué de plusieurs autres, il se met du côté du plus foible,

  1. Jean-Baptiste Budes, comte de Guébriant, maréchal de France, né en 1602, mort en 1643.