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Enfin, à dix-huit ans, elle se mit en dévotion, et, comme j’ai dit, elle se fit religieuse.

Le président Pascal a laissé un fils, Blaise Pascal[1], qui témoigna dès son enfance l’inclination qu’il avoit aux mathématiques. Son père lui avoit défendu de s’y adonner qu’il n’eût bien appris le latin et le grec. Cet enfant, dès douze à treize ans, lut Euclide en cachette, et faisoit déjà des propositions ; le père en trouva quelques-unes ; il le fait venir et lui dit : « Qu’est-ce que cela ? » Ce garçon, tout tremblant, lui dit : « Je ne m’y suis amusé qu’aux jours de congé. — Et entends-tu bien cette proposition ? — Oui, mon père. — Et où as-tu appris cela ? — Dans Euclide, dont j’ai lu les six premiers livres (on ne lit d’ordinaire que cela d’abord). — Et quand les as-tu lus ? — Le premier en une après-dînée, et les autres en moins de temps à proportion. » Notez qu’on y est six mois avant que de les bien entendre.

Depuis, ce garçon inventa une machine admirable pour l’arithmétique. Pendant les dernières années de l’intendance de son père, ayant à faire pour lui des comptes de sommes immenses pour les tailles, il se mit dans la tête qu’on pouvoit, par de certaines roues, faire infailliblement toutes sortes de règles d’arithmétique ; il y travailla et fit cette machine qu’il croyoit devoir être fort utile au public ; mais il se trouva qu’elle revenoit à quatre cents livres au moins, et qu’elle étoit si difficile à faire, qu’il n’y a qu’un ouvrier, qui est à Rouen, qui la sache faire ; encore faut-il que Pascal y soit présent. Elle peut être de quinze pouces de long

  1. Blaise Pascal, né à Clermont en 1623, mort à Paris en 1662.