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reçut, il n’y a pas long-temps, du comte de Pigneranda ? Cet ambassadeur, fameux par la rupture de la paix de l’Europe, ayant passé à Angoulême, s’enquéroit, à l’ordinaire des étrangers, de ce qu’il y avoit de plus remarquable dans le pays. On lui proposa incontinent M. de Balzac comme la chose la plus rare : il repartit qu’il avoit appris ce nom-là en Espagne, long-temps avant que d’en partir ; qu’il ne l’avoit pas trouvé moins célèbre en Allemagne, d’où il venoit, et lui envoya incontinent un Minime walon, homme de lettres, qui lui servoit d’aumônier, pour lui dire qu’il souffroit, avec plus de peine qu’il n’en avoit eu pendant tout son voyage, la défense de faire des visites ; que s’il lui eût été libre d’en faire, il fût venu de bon cœur en sa chambre pour voir une personne si célèbre dans tous les lieux où les grandes vertus sont en estime. Ce compliment ne fut pas borné à ce peu de paroles. Mais qu’ai-je affaire d’emprunter de la bouche de nos ennemis des louanges pour un homme qui a peine d’en souffrir des personnes qui lui sont les plus chères ? Il se contente de leur amitié comme de la vôtre, monsieur, de celle de M. Chapelain, et de peu d’autres.

« Oserois-je vous supplier de faire part de ma relation à M. Chapelain ? Je sais qu’il aime ce que nous aimons, comme il en est aimé aussi ; je sais qu’il me fait l’honneur de me vouloir du bien. Permettez-moi, je vous supplie, de l’assurer de mon très-humble service, et croyez, s’il vous plaît, que je serai toute ma vie, etc.[1]. »

  1. Balzac a envoyé jusqu’à cinq copies de cette lettre, et toutes de