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il n’y eut plus d’espérance de le voir, elle n’eut presque plus d’entretien qu’avec ses proches, qui furent jugés très-dignes de son alliance[1]. M. le cardinal ne s’en arrêta pas là ; après s’être long-temps informé s’il ne pourroit point satisfaire au désir qu’il avoit de long-temps de connoître le visage d’une personne si généralement estimée, il se résolut enfin de l’envoyer visiter par un gentilhomme des siens, nommé le chevalier de Terlon. Ce gentilhomme alla à la maison de M. de Balzac, à trois lieues de la ville, et lui dit que M. le cardinal, son maître, lui avoit commandé de le venir assurer de son service très-humble ; qu’il avoit une forte passion de le voir et de l’entretenir à Angoulême, où il avoit appris son indisposition ; qu’il seroit venu lui-même s’en assurer en sa maison, s’il n’eût appréhendé de l’incommoder ; mais qu’il seroit fâché qu’on lui reprochât d’avoir passé si près du plus grand homme de notre siècle sans avoir eu dessein de lui rendre cette petite civilité[2].

« M. de Balzac, dont la discrétion ne vous est pas moins connue que le mérite, ne pouvoit attribuer un si grand excès de civilité qu’à la courtoisie de l’am-

  1. À la vérité elle leur parla comme à des gens qui sont des principaux de la ville. (T.)
  2. M. de Montausier, qui étoit alors à Angoulême, dit que la vérité est que Lionne, pour faire plaisir à Chapelain, son ami, fit faire ce voyage au chevalier de Terlon, et que toute la civilité vint de lui et de M. Servien. Le cardinal n’usa jamais de termes si obligeants pour les princes du sang même. « Si le cardinal avoit fait cela, disoit le marquis, il seroit digne de tout ce que Balzac a écrit depuis contre lui. » Il est bien vrai que le cardinal dit quelque chose d’élégant, mais tout cela venoit de Lionne. (T.)