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s’en plaignit, et le nonce eut charge de le citer à Rome : ses amis accommodèrent la chose, et il fut conclu qu’en présence de deux Jésuites il feroit satisfaction au Pape et écriroit une rétractation. Cette rétractation fut imprimée ; mais elle étoit si obscure, qu’il ne savoit ce que c’étoit, et il eût pu se vanter, s’il eût voulu, de ne s’être point rétracté. Le Pape, pourtant, s’en contenta. Depuis, il s’avisa mal-à-propos de se mêler entre Balzac et Du Moulin, qui s’écrivirent quelques lettres, et fit je ne sais quel petit écrit intitulé : Avis judicieux. En ce temps-là, il lui vint une vision de faire certaines conférences à Saint-Victor ; il étoit là comme un régent dans sa classe.

Une fois que Bois-Robert lui louoit fort la politique du cardinal de Richelieu, il lui dit : « Vous connoissez de plus grands politiques que lui ; vous en voyez. » Bois-Robert eut la malice de feindre toujours de ne pas entendre qu’il vouloit qu’on lui dît : « Qui ? vous ? » Et, au lieu de cela, il lui dit : « Mais que blâmez-vous à sa politique ? — Baillez-le-moi mort, baillez-le-moi mort, répondit-il, et je vous le dirai. »

Une autre fois il entreprit de prouver que Démosthènes, Cicéron, et tous les plus grands orateurs de l’antiquité, n’avoient rien entendu à l’éloquence en comparaison de saint Paul, et dit un million de choses grotesques. Balzac, qui y étoit allé par curiosité, ne put s’empêcher d’en faire des contes, et de là vint la grande querelle. Il voulut faire passer Balzac pour un écolier, et Balzac fit le Barbon, que depuis il a donné lorsque Ménage persécuta tant Montmaur le grec : c’est pour cela qu’on y trouve si peu de choses qui conviennent à ce pédant.