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Un jour qu’il avoit promis d’expliquer la Trinité le plus clairement du monde en un sermon, il dit du grec, puis ajouta : « Voilà pour vous, femmes. »

C’est le plus prolixe prédicateur, harangueur et compositeur de livres qu’on ait jamais vu. À Gaillon, qu’il appelle notre palais royal et archiépiscopal de Gaillon, il a une imprimerie qu’il appelle aussi notre imprimerie archiépiscopale.

Il fit une fois je ne sais quel livre où il étoit peint avec sa barbe longue et étroite ; car, quoique jeune, il la portoit longue. On l’appelle barbe de natte, car elle étoit d’un blond fort doré[1]. Le pape Urbain, à qui il fit présenter ce livre, n’en dit autre chose, sinon : Bella barba. — Mais, saint Père, lui dit-on, que vous semble de ce livre ? — Veramente, bellissima barba. L’archevêque, mal satisfait de cela et de quelque autre chose encore, écrivit un livre de la puissance des papes, où il les vouloit réduire au rang des évêques. Le pape

  1. Voici ce que fit M. d’Albi (d’Elbène), celui qui se sauva en Catalogne du temps de M. de Montmorency.

    Épitaphe de M. de Rouen faite de son vivant.

    Ci-gît un prélat honoré
    Qui porta la barbe prolixe,
    De couleur de vermeil doré,
    Brillant comme une étoile fixe.
    Prêchant sur un événement
    Il sermona si longuement,
    Qu’il en trépassa de détresse,
    Non sans laisser un savoir mon
    Laquelle des deux choses est-ce
    Qui fut plus longue en son espèce,
    De sa barbe, ou de son saint Vinon. (T.)