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Bien loin de s’amender en vieillissant, il fit une chanson où il y a :

Et, par ma raison, je butte
À devenir bête brute.

Il prêche l’athéisme partout où il se trouve, et une fois il fut à Saint-Cloud chez la Du Ryer passer la semaine sainte, avec Miton, grand joueur, Potel[1], le conseiller au Châtelet, Raincys, Moreau[2] et Picot, pour faire, disoit-il le carnaval.

Picot mourut à peu près comme il avoit vécu : il tomba malade dans un village ; il fit venir le curé et lui dit qu’il ne vouloit point qu’on le tourmentât et qu’on lui criaillât aux oreilles, comme on faisoit à la plupart des agonisans : le curé en usa bien, et il lui donna par son testament trois cents livres ; mais comme il vit que le curé, le croyant expédié, ou peu s’en falloit, se mettoit à criailler comme on a de coutume, il le tira par le bras, et lui dit : « Sachez, galant homme, si vous ne me tenez ce que vous m’avez promis, qu’il me reste encore assez de vie pour révoquer la donation. » Cela rendit le curé plus sage, et l’abbé expira assez en repos.

Pour Des Barreaux, il a eu tout le loisir de chanter la palinodie ; il a bien fait le fou en mourant, comme il le faisoit quand il étoit malade[3].

  1. Il est revenu de cela. (T.)
  2. Il est mort trop tôt, pour nous avoir pu persuader qu’il en fût bien revenu. C’étoient des jeunes gens qui vouloient faire les bons compagnons. (T.)
  3. Des Barreaux s’amenda dans sa dernière maladie, et il composa ce beau sonnet si connu qu’il seroit superflu de le citer.