Page:Tallemant des Réaux - Les historiettes, tome 3.djvu/121

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

peut rendre à une maîtresse. Je crois que cela est vrai, parce que je ne sache personne qui le pût inventer[1]. Sa mère est presque innocente ; c’est une dévote. J’ai vu à Rome un Particelli dans l’hôpital des fous, et il étoit devenu fou par amour. Pour Toré, M. d’Emery avoit résolu de s’en défaire de quelque façon que ce fût ; et comme ce garçon étoit malade à la maison de Petit, son factotum, au faubourg Saint-Antoine, il manda à Petit : « Faites enterrer une bûche au lieu de mon fils, et l’envoyez dans quelque couvent bien loin. » Petit n’en voulut rien faire, et dit qu’il espéroit le faire revenir en son bon sens. Depuis, Toré a voulu faire un procès à Petit, sans considérer le service qu’il lui avoit rendu.

Il étoit déjà président aux enquêtes quand il fut prié par hasard à une collation à Meudon, où il vit sa première maîtresse, mademoiselle Le Cogneux, qui étoit mariée à un gentilhomme de Champagne nommé Sémur[2]. J’ai dit ailleurs comment ce mariage avoit été fait[3]. Sémur, en ce temps-là, étoit à l’armée. Toré se renflamme, la traite, et devient assez familier avec elle. Elle est jolie, spirituelle, elle a bien du feu ; alors

  1. On a dit d’un M. d’Esche, frère de madame de Villarceaux, dont le mari a fait tant de fracas avec les femmes, que lorsque le curé qui l’épousa lui demanda s’il n’avoit point donné sa foi à une autre, qu’il répondit qu’il ne l’avoit jamais donnée qu’à une épingle jaune. Ainsi Toré ne seroit que le second. Ce d’Esche voulut une fois faire un haras de mulets. (T.)
  2. Elle dit qu’ayant à prétendre quelque récompense de la feue Reine, comme M. d’Emery régloit les prétentions des créanciers, elle s’adressa à M. de Toré qui s’éprit tout de nouveau. (T.)
  3. Voyez plus haut l’article sur le président Le Cogneux et sur son fils.