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grand service à M. Chapelain qu’il lui pouvoit rendre. Pour moi, je suis épouvanté d’un si grand parturient montes : après cela prenez les Italiens pour maîtres ; allez vous instruire chez ces messieurs. Patru a raison lorsqu’il dit que M. Chapelain n’est sage qu’à l’italienne, c’est-à-dire que la morgue et le flegme font toute sa sagesse. Il sait assez bien notre langue, je veux dire il opine bien sur notre langue ; mais il a bien de la superficie à tout le reste : cependant M. de Longueville, dont il avoit tiré quarante-six mille livres, a augmenté sa pension de mille francs.

Sint Mæcenates, non deerunt, Flave, Marones.


D’abord la curiosité fit bien vendre le livre. La grande réputation de l’auteur y fit courir bien du monde ; mais ce ne fut qu’un feu de paille, et je ne sais s’il n’espéroit encore quelque augmentation de pension, s’il pensoit à l’achever[1], car il a appelé de son siècle à la postérité ; mais je me trompe fort si la postérité a fort les oreilles rompues de cet ouvrage.

Après le succès de sa première ode, il crut qu’il n’avoit que faire du conseil de personne : il est retourné à sa dureté naturelle, et pour l’économie, hélas ! peut-on avoir rêvé trente ans pour ne faire que rimer une histoire ? Car tout l’art de cet homme c’est de suivre le gazetier. Comme le livre étoit cher, on le vendoit

  1. Chapelain a terminé son poème ; on rencontre assez souvent des copies manuscrites des douze derniers livres. Il en existe une à la Bibliothèque du Roi.