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où trouvera-t-on des gens soigneux, si madame de Rambouillet cesse de l’être ? Un livre de cette importance, me le renvoyer comme cela ! » Conrart, après lui avoir laissé faire tout son service, se mit à rire et lui confessa la malice.

Une fois Chapelain, m’envoyant un livre espagnol, m’écrivit que j’en eusse bien du soin, et que je savois sa délicatesse sur le chapitre des livres. J’ôte le papier dont ce livre étoit enveloppé, et je trouve que la moitié de la couverture était mangée : « Véritablement, dis-je, voilà une délicatesse dont je n’avois jamais ouï parler. »

Quand M. de Longueville fut nommé pour aller à Munster, M. de Lyonne fit nommer M. Chapelain pour secrétaire des plénipotentiaires ; c’étoit la quatrième personne, et Lyonne devoit avoir cet emploi-là quand le cardinal de Mazarin fut nommé par le cardinal de Richelieu pour y aller. Cela a valu douze mille écus à Boulanger, secrétaire de M. de Longueville. Chapelain alla trouver M. de Longueville, et lui représenta que ce n’étoit pas là le moyen d’achever la Pucelle. « Vous ferez bien l’un et l’autre, lui répondit-il. — Mais, monsieur, si je réussis, comme je tâcherai de réussir, êtes-vous assuré que la cour ne m’oblige pas à d’autres choses qui ne s’accordent nullement avec votre poème ? — Bien, dit monsieur de Longueville ; faites donc que Boulanger ait votre place. » Lyonne fit l’affaire. Depuis, le même Lyonne dit tant de bien de lui au cardinal Mazarin, après lui avoir fait faire une ode de six cents vers à sa louange, qu’il le voulut voir, et lui dit, comme il prenoit congé : « M. de Lyonne vous dira ce que j’ai fait pour vous ;