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trouve pourtant trop de raison, trop de sagesse, si j’ose ainsi dire : cela ne sent pas assez la fureur poétique, et peut-être elle est trop longue.

Il avoit déjà fait quelque chose de la Pucelle en ce temps-là. M. d’Andilly, voyant l’approbation qu’avoit eue cette ode, se voulut servir de l’occasion de faire quelque chose pour lui. Un soir il lui demanda les deux livres de la Pucelle qui étoient faits. Lui crut que ce n’étoit que pour les lire à loisir, et les lui donna. Ce n’étoit pas seulement pour cela, car il avoit fait entendre par le moyen de sa sœur, mademoiselle Le Maistre, à madame de Longueville, et ensuite à son mari, de quelle importance il lui étoit pour l’honneur de sa maison que ce poème s’achevât. Or, cette mademoiselle Le Maistre étoit fort bien dans l’esprit de l’un et de l’autre, et jusque là que madame de Longueville étant obligée d’aller à Lyon, où M. le comte[1] fut aussi malade que le feu Roi, elle confia sa fille, qui étoit le seul enfant qu’elle eût[2], à mademoiselle Le Maistre, retirée dès ce temps-là à Port-Royal, avec sa

    de trente strophes de dix vers, dont il est difficile d’achever la lecture, d’autant que, comme Tallemant l’a judicieusement fait observer, il n’y a rien du désordre et de l’emportement qui sont les principaux caractères du poète lyrique.

  1. Le comte de Soissons, père de Louise de Bourbon, duchesse de Longueville, première femme du duc.
  2. Elle avoit perdu deux fils, l’un à deux ans, l’autre en naissant. Marie d’Orléans, demoiselle de Longueville, épousa en 1657 Henri de Savoie, duc de Nemours ; elle devint veuve en 1659. Le frère de son mari avoit été tué en duel par le duc de Beaufort. La duchesse de Nemours a laissé des Mémoires sur la Fronde. Ils font partie du tome 34 de la deuxième série de la Collection des Mémoires relatifs à l’histoire de France.