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étoit à mademoiselle de Gouy, et, ouvrant le cabinet, lui fait voir Gombauld et la cale ; à la vérité il ne les y laissa pas long-temps. Notre homme s’en fâcha tout de bon, mais enfin il fallut bien s’apaiser.

À sa mode il cajole tout ce qu’il rencontre. Je lui ai vu dire des douceurs à notre femme de charge, qui n’étoit ni jeune ni avenante. La femme de Courbé[1] alla chez lui un jour ; il n’y a pas d’araignée au monde qui ne soit plus jolie qu’elle ; il lui en conta, et après il disoit : « Je vous assure, elle écoute bien. » Il cajole à mon goût d’une façon qui n’est nullement naturelle, ou, si elle l’est, ce n’est qu’à lui seul ; cependant il croit raffiner, et a toujours la cour à la bouche, mais la belle cour, et pour celle-ci il dit de la plupart des femmes qu’il voit : « Elles auroient besoin de deux ans de cour. »

Une de ses plus grandes foiblesses, c’est de craindre qu’on ne le traite de gueux. Il n’a jamais voulu que ses amis l’assistassent, et une fois depuis la régence, car le feu Roi, après la mort du cardinal de Richelieu, raya de sa main toutes les pensions, on fut contraint de le quêter, et après on lui fit accroire qu’on avoit trouvé moyen de toucher cela de l’argent du Roi. Ce n’est pas que je trouve étrange qu’il ne veuille pas recevoir indifféremment de ses amis ; mais je voudrois qu’il choisît entre tous, et qu’il regardât s’il y en a quelqu’un à qui il veuille avoir une si grande obligation : mais il n’en veut pas prendre le soin, et s’attache un peu trop à la Providence.

Il a vendu quelques ouvrages. J’ai aidé autant que

  1. Augustin Courbé, le libraire-éditeur de Gombauld.