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fut mis au jour, dit que la deuxième édition ne valoit pas la première, car il lit bien et fait valoir ce qu’il lit.

Dès que Gombauld crut que la Reine lui vouloit faire cet honneur, il alla trouver madame de Rambouillet, qui a toujours été de ses amis, et la pria de lui vouloir bien dire son avis sur la manière dont il s’y devoit prendre : « Madame, lui dit-il, prenez que vous soyez la Reine, et j’entrerai avec mon livre. » En disant cela, il va dans l’antichambre ; madame de Rambouillet se mordoit les lèvres de peur de rire. Il rentre un peu après avec les grimaces les plus plaisantes du monde, et à tout bout de champ il lui demandoit : « Cela sera-t-il bien ainsi ? — Oui, monsieur, fort bien. — Madame, trouvez-vous ce ton-là comme il faut ? N’est-il point trop haut ? est-il assez respectueux ? » et lui demandoit comme cela sur toutes choses. Elle dit qu’elle n’a jamais mieux passé son temps en sa vie ; mais que, pour avoir un plaisir parfait, il eût fallu que quelqu’un les eût vus, et qu’elle l’eût su. Cependant je ne sais pas par quelle aventure tout ce soin lui fut inutile, car Gombauld dit qu’il n’a jamais lu Endymion à la Reine-mère.

Je ne sais si madame de La Moussaye, sœur du feu comte de La Suze, et mère de La Moussaye, le petit-maître, étoit cette petite Filis ; mais on croit qu’il a eu de grandes privautés avec elle, car il a toujours affecté d’en vouloir à des dames de qualité, et me faisoit excuse une fois de ce que dans ses poésies il y avoit des vers pour une paysanne. « Mais, disoit-il, c’étoit la fille d’un riche fermier de Xaintonge, et elle avoit plus de dix mille écus en mariage. »