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après maître Claude, qui avoit remarqué que M. Chapelain avoit vu madame de Rambouillet, dit à sa maîtresse : « Madame, M. Chapelain vous a-t-il rapporté ce livre, comme il avoit dit ? — Non, répondit-elle. — Ha ! le galant ! s’écria-t-il ; ah ! le drôle ! je me doutois bien que ce n’étoient que des compliments. »

M. de Grasse[1] étant enrhumé, madame de Rambouillet envoya maître Claude pour savoir de ses nouvelles. « Je vous assure, lui dit M. de Grasse pour rire, mon pauvre maître Claude, mon ami, j’ai été plus mal qu’on ne croit ; j’ai pensé perdre l’esprit. — Comment, monsieur, lui dit le bon argentier, vous avez pensé perdre l’esprit ? — Oui, mon cher. — Hélas ! monsieur, c’eût été grand dommage ; et à présent vous remettez-vous ? — Oui, et j’espère que cela ne sera rien, s’il plaît à Dieu ; mais ne le dites à personne, je vous prie. » Maître Claude va retrouver sa maîtresse, et lui dit « que M. de Grasse se portoit assez bien pour le présent ; mais, madame, ajouta-t-il, je ne sais plus à qui on se fiera en ce monde ; cet homme avoit passé pour si sage. — Que voulez-vous dire ? dit la marquise en l’interrompant ? — C’est, répondit-il en s’approchant de son oreille, que ce n’étoit pas qu’il fût enrhumé, mais c’étoit qu’il étoit fou. »

Un jour, comme madame de Rambouillet étoit à Rambouillet, on rendit le pain bénit, et on en présenta à tous ceux de la maison ; mais maître Claude, qui croyoit qu’on ne lui en avoit pas présenté assez tôt, dit à celui qui le lui portoit : « Porte-le au diable, je n’en

  1. Godeau.