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le nomme derechef, et transfère l’abbesse aux filles de la Miséricorde. La supérieure de la maison la flatta pour faire faire madame sa nièce coadjutrice ; cependant un beau jour elles se brouillèrent et se séparèrent. Voilà madame d’Yères logée chez un loueur de carrosses. Elle plaide et fait imprimer un factum, ou plutôt un libelle diffamatoire contre sa famille, et dit là-dedans que tout ce qu’elle souffre ne vient que de ce qu’elle n’a pas voulu faire sa sœur de Pisani coadjutrice, et elle envoie cela dans tous les couvens. Il n’y a rien de plus faux ; on ne l’en a jamais pressée, et madame de Pisani la seroit de Saint-Étienne, si elle avoit voulu ; mais c’est une bonne fille sans ambition, qui veut vivre dans une maison plus austère ; et puis aujourd’hui (1663) madame de Montausier est trop bien à la cour pour manquer une bonne place pour sa sœur, si elle s’en mettoit bien en peine. Le Parlement ordonna que madame d’Yères seroit mise dans quelque maison religieuse, et on l’obligea à aller loger dans une maison où il y a une espèce de communauté de filles, dans la rue Saint-Antoine. Elle dit qu’on lui avoit démis deux côtes, en la pressant de sortir de chez elle ; puis elles étoient rompues ; enfin elle n’en ose plus parler. Le premier président a empêché que cela ne fût plaidé ; il en a fait un procès par écrit[1].

Madame de Saint-Étienne, Louise-Isabelle d’Angennes, étoit religieuse à Yères avec madame de Pisani, sa sœur ; mais il fallut les en tirer toutes deux, parce que madame d’Yères est une fort déraisonnable

  1. Claire-Diane d’Angennes de Rambouillet, abbesse d’Yères, mourut le 19 mars 1699 ; sa sœur Catherine Charlotte d’Angennes, qu’on appelle madame de Pisieux, lui succéda. (Gallia christiana, t. 7, p. 612.)