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Elle faisoit souvent un même conte. Madame de Montausier disoit : « Fi ! fi ! où avez-vous appris cela ? — Attendez, dit cette enfant, ne seroit-ce point de ma grand’maman de Montausier ? » Cela se trouva vrai.

Elle disoit qu’elle vouloit faire une comédie : « Mais, ma grand’maman, ajoutoit-elle, il faudra que Corneille y jette un peu les yeux, avant que nous la jouiions. »

Un page de son père, qui étoit fort sujet à boire, s’étant enivré, le lendemain elle lui voulut faire des réprimandes. « Voyez-vous, lui disoit-elle, pour toutes ces choses-là, je suis tout comme mon papa, vous n’y trouverez point de différence. »

On lui dit : « Prenez ce bouillon pour l’amour de moi. — Je le prendrai, dit-elle, pour l’amour de moi, et non pour l’amour de vous. »

Un jour elle prit un petit siége et se mit auprès du lit de madame de Rambouillet. « Or çà, ma grand’maman, dit-elle, parlons d’affaires d’État, à cette heure que j’ai cinq ans. » Il est vrai qu’en ce temps-là on ne parloit que de fronderie.

M. de Nemours, alors archevêque de Reims, lui disoit qu’il la vouloit épouser. « Monsieur, lui dit-elle, gardez votre archevêché : il vaut mieux que moi. »

Elle n’avoit que cinq ans quand on lui voulut faire tenir un enfant. Le curé de Saint-Germain la refusa, disant : « Elle n’a pas sept ans. — Interrogez-la, » lui dit-on. Il l’interrogea devant cent personnes ; elle répondit fort assurément, il la reçut et lui donna bien des louanges.

Un jour qu’elle étoit couchée avec madame de Rambouillet, M. de Montausier la voulut tâter. « Ar-