Page:Tallemant des Réaux - Les historiettes, tome 2.djvu/257

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

« Et vous, combien y a-t-il ? lui dit-elle, car vous n’êtes guère plus grand[1]. »

À cause de la petite vérole de sa tante de Rambouillet, on la mit dans une maison là auprès. Une dame l’y fut voir : « Et vos poupées, mademoiselle, lui dit-elle, les avez-vous laissées dans le mauvais air ? — Pour les grandes, répondit-elle, madame, je ne les ai pas ôtées, mais pour les petites, je les ai amenées avec moi. » À propos de poupées, elle avoit peut-être sept ans quand la petite Des Réaux[2] la fut voir. Cette autre est plus jeune de deux ans. Mademoiselle de Montausier la vouloit traiter d’enfant, et lui disoit en lui montrant ses poupées : « Mettons dormir celle-là. — J’entends bien, disoit l’autre, ce que vous voulez dire. — Non, tout de bon, reprenoit-elle, elles dorment effectivement. — Voire ! je sais bien que les poupées ne dorment point, répliquoit l’autre. — Je vous assure que si qu’elles dorment, croyez-moi ; il n’y a rien de plus vrai. — Elles dorment donc, puisque vous le voulez, » dit la petite Des Réaux avec un air dépité ; et en sortant elle dit : « Je n’y veux plus retourner, elle me prend pour une enfant. »

On lui demandoit laquelle étoit la plus belle, de madame de Longueville, ou de madame de Châtillon qu’elle appeloit sa belle-mère. « Pour la vraie beauté, dit-elle, ma belle-mère est la plus belle. » Elle disoit à un gentilhomme de son papa : « Je ne veux pas seulement que vous me baisiez en imagination. »

  1. Aussi appeloit-on Godeau, le Nain de Julie, comme on l’a vu plus haut.
  2. Nièce ou cousine de l’auteur de ces Mémoires.