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M. le cardinal de Lyon, il envoya quérir Dalier, homme d’affaires, son grand factotum en fait de finances, après Perrault, et lui dit en une colère horrible : « Vous avez fait donner dix mille écus à mon fils à Lyon, vous êtes cause de sa perte : s’il n’eût point eu tant d’argent, il fût allé voir le cardinal de Lyon, oncle de sa femme ; il n’eût pas passé sans lui rendre visite. » Dalier dit qu’il n’avoit fait compter à M. d’Enghien que cent pistoles par-delà la somme ordonnée par M. le Prince. Or, le cardinal de Richelieu prit cela au point d’honneur ; c’étoit par fierté que M. d’Enghien n’avoit point été voir le cardinal de Lyon, sous prétexte que les princes du sang ne vouloient céder qu’au seul cardinal de Richelieu, et non aux autres. Ils lui cédoient, disoient-ils, comme premier ministre, comme les princes autrefois cédoient à l’abbé Suger. Mais il étoit régent. Le cardinal, qui vouloit plaire à Rome, disoit que c’étoit à la pourpre éminentissime qu’il falloit rendre cet honneur. Il rapportoit l’exemple des souverains d’Italie. Le cardinal de Richelieu, effectivement, vouloit qu’ils cédassent au cardinal Mazarin. Au retour de Perpignan, par dépit, le père et le fils s’en allèrent en Bourgogne, et ils y étoient quand le cardinal mourut. On a cru que le cardinal avoit alors dessein de les perdre quand il mourut ; mais c’étoit seulement qu’il les vouloit désunir pour être maître du duc d’Enghien, et l’obliger d’avoir recours à lui.

Le Roi avait laissé ici feu M. le Prince pour commander durant le voyage de Perpignan. Au Te Deum il se mit à la tête du parlement, comme le Roi. Le parlement vouloit se retirer, le premier président