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M. d’Orléans la voit. Quelques jours après, on joue la grande comédie. Bois-Robert et le chevalier Desroches avoient ordre de convier les dames ; plusieurs femmes non conviées, et entre elles bien des je ne sais qui, entrèrent sous le nom de madame la marquise celle-ci, et madame la comtesse celle-là. Deux gentilshommes qui les recevoient à la porte, voyant que leur nom étoit sur le mémoire, et qu’elles étoient bien accompagnées, les livroient à deux autres qui les menoient au président Vigné et à M. de Chartres (Valençay, depuis archevêque de Reims, que Bois-Robert appeloit le Maréchal-de-camp comique), et ils avoient le soin de les placer[1]. Le Roi, qui étoit ravi de pincer le cardinal, ayant eu vent de cela, lui dit, en présence de M. d’Orléans : « Il y avoit bien du gibier l’autre jour à votre comédie. — Hé ! Comment n’y en auroit-il point eu, dit M. d’Orléans, puisque, dans la petite salle où j’eus tant de peine à entrer moi-même, la petite Saint-Amour, qui est une des plus grandes gourgandines de Paris, y étoit. » Voilà le cardinal interdit ; il enrageoit, et ne dit rien, sinon : « Voilà comme je suis bien servi ! » Au sortir de là : « Cavoie, dit-il à son capitaine des gardes, la petite Saint-Amour étoit l’autre jour à la répétition. — Monseigneur, elle n’est point entrée par la porte que je gardois. » Palevoisin, gentilhomme de Touraine, parent de l’évêque de Nantes, Beauveau, ennemi de

  1. Le cardinal employoit des prêtres et des évêques à placer à la comédie. Depuis le cardinal donna des billets. (T.) — Voir ci-après, dans l’Historiette de Léonor d’Estampes Valençay, une note à ce sujet.