On trouva la piste de toutes les menées de M. de Thou. C’étoit le plus inquiet de tous les hommes. M. le Grand l’avoit appelé Son Inquiétude. Quand il sortoit, il étoit quelquefois une heure sans pouvoir déterminer où il iroit. Par une ridicule affectation de générosité, dès qu’un homme étoit disgracié, il le vouloit connoître, et lui alloit faire offre de services. Étant conseiller, ou maître des requêtes, il alla voir le cardinal de La Valette à Mayence, et fut à la guerre, d’où il revint avec un bras cassé. On se moqua de lui. Si M. le Grand mourut en galant homme, M. de Thou fit le cagot. Il composa des inscriptions pour mettre à des offrandes qu’il faisoit. Il fit des vœux, des fondations et autres choses semblables. Il demandoit sans cesse s’il n’y avoit point de vanité dans son humilité. Enfin, il paillarda furieusement son vin, comme on dit, et il sembloit avec ses longs propos qu’il voulût se familiariser avec la mort. Je trouve qu’il mourut en pédant, lui qui avoit toujours vécu en cavalier, car sa soutane ne tenoit à rien. Il faisoit le coup de pistolet étant intendant de l’armée. Il étoit amoureux de madame de Guémenée. On dit qu’il lui écrivit après avoir été condamné. Au moins écrivit-il à une dame. C’étoit un vilain rousseau. Les grands seigneurs et les grandes dames l’avoient gâté, et aussi l’opinion d’être descendu des comtes de Toul, lui qui se devoit contenter d’être d’une maison illustre par de belles charges et des écrits célèbres[1].
- ↑ Cyprien Perrot, conseiller de la grand’chambre, père du président Perrot, et ami intime du président de Thou l’historien, trouva un jour par hasard un acte par lequel il paroissoit que l’avocat de Thou, de qui venoit ce président et le premier président du Parlement, étoit