chose, tantôt une autre, et enfin elle le fit son héritier. Il envoya son corps par le messager au lieu de sa sépulture.
Quand on fit le mariage de la reine d’Angleterre[1], on choisit M. de Chevreuse pour représenter le roi de la Grande-Bretagne, parce qu’il étoit son parent fort proche, qu’il avoit, comme j’ai dit, fort bonne mine, et que madame de Chevreuse avoit toutes les pierreries de la maréchale d’Ancre. Elle accompagna la Reine en Angleterre. Milord Rich, depuis comte Holland, l’avoit cajolée ici en traitant du mariage. C’étoit un fort bel homme, mais sa beauté avoit je ne sais quoi de fade. Elle disoit des douceurs de son galant et de celles de Buckingham pour la Reine, que ce n’étoit pas qu’ils parlassent d’amour, et qu’on parloit ainsi en leur pays à toutes sortes de personnes. Quand elle fut de retour d’Angleterre, le cardinal de Richelieu s’adressa à elle dans le dessein qu’il avoit d’en conter à la Reine ; mais elle s’en divertissoit. J’ai ouï dire qu’une fois elle lui dit que la Reine seroit ravie de le voir vêtu de toile d’argent gris de lin[2]. Il l’éloigna, voyant qu’elle se moquoit de lui. Après elle revint, et Monsieur disoit
- ↑ Henriette-Marie de France, fille de Henri IV, qui épousa Charles Ier.
- ↑ Suivant le comte de Brienne, les caprices de la Reine allèrent plus loin que de vouloir voir le cardinal vêtu de toile d’argent gris de lin. « La princesse, dit-il, et sa confidente (madame de Chevreuse sans aucun doute) avoient en ce temps l’esprit tourné à la joie pour le moins autant qu’à l’intrigue. Un jour qu’elles causoient ensemble et qu’elles ne pensoient qu’à rire aux dépens de l’amoureux cardinal : « Il est passionnément épris, madame, dit la confidente, je ne sache rien qu’il ne fît pour plaire à Votre Majesté. Voulez-vous que je vous l’envoie un soir, dans votre chambre, vêtu en baladin ; que je l’oblige à danser ainsi une sarabande ; le voulez-vous ? il y viendra. — Quelle folie ! »