beaucoup gagné, et avoit pris tous les meubles. Les parens, voyant que cette femme vouloit marier cette héritière au fils de Polignac, son second mari, s’en plaignirent à Henri IV, qui la maria avec le marquis de La Force.
Au siége de Montauban on élut, pour commander dans la place, le comte d’Orval, comme fils de duc et pair, et aussi pour obliger M. de Sully, son père. Puis, c’étoit élire en effet M. de La Force, dont ce comte avoit épousé la fille. Le beau-père étoit lieutenant de son gendre. On avoit donné au comte d’Orval un vieux capitaine pour se tenir auprès de sa personne et lui dire ce qu’il falloit faire. Or, un jour, comme les ennemis avoient attaqué un ouvrage avancé, le comte d’Orval, armé jusqu’aux dents comme un jacquemart, étoit encore à pied dans le fossé de la ville, que le vieux capitaine, qui n’étoit pas peut-être plus échauffé, le retint en lui disant : « Monseigneur, ne hasardez pas votre personne. » (Depuis, on appela ce vieux capitaine : Monseigneur, ne hasardez pas votre personne.) M. de La Force y entra tout à cheval ; de sorte que les mousquetades pleuvoient sur lui. Son second fils, nommé Castelnau, lui dit en l’arrêtant : « Monsieur, je ne permettrai pas que vous vous exposiez ainsi. » Le bon homme le repoussa fièrement et lui dit : « Castelnau, vous devriez faire ce que je fais. »
L’année que les ennemis prirent Corbie, le cardinal de Richelieu l’avoit toujours dans son carrosse, parce que le peuple l’aimoit[1]. Et quand on leva ici des gens
- ↑ En 1636. « On n’entendoit que murmures de la populace contre le cardinal, qu’elle menaçoit comme étant cause de ces désordres ; mais lui qui étoit intrépide, pour faire voir qu’il n’appréhendoit rien,