y avoit fait parler une muette en la touchant comme si elle eût eu les écrouelles. On lui montra la fille. Ce bon Père disoit l’avoir vu, et après lui toute la ville le disoit aussi. La Reine arrivée à Lyon, le Père Souffran fit faire une procession et chanter. La Reine prend ce bon religieux, et, ayant joint le Roi, elle lui dit qu’il devoit bien louer Dieu de la grâce qu’il lui avoit faite d’opérer par lui un si grand miracle. Le Roi dit qu’il ne savoit ce qu’on vouloit dire, et le Cordelier disoit : « Voyez la modestie de ce bon prince ! » Enfin le Roi déclara que c’étoit une fourberie et vouloit envoyer des gens de guerre pour punir ces imposteurs.
Dès lors il aimoit déjà madame d’Hautefort, qui n’étoit encore que fille de la Reine. Les autres lui disoient : « Ma compagne, tu ne tiens rien ; le Roi est saint. »
Ses amours étoient d’étranges amours. Il n’avoit rien d’un amoureux que la jalousie. Il entretenoit madame d’Hautefort de chevaux, de chiens, d’oiseaux et d’autres choses. Il la fit dame d’atours en survivance ; elle eut quelques dons. Mais il étoit jaloux d’Ecquevilly-Vassé ; et il fallut qu’on lui fît accroire qu’il étoit parent de la belle. Le Roi le voulut savoir de d’Hozier. D’Hozier avoit le mot, et dit tout ce qu’on voulut. Ce M. d’Ecquevilly étoit un fort galant homme ; il fit long-temps l’amour à la Reine avec des révérences, et c’est assez dire à une Reine. Le cardinal l’éloigna, parce que c’étoit un garçon qui ne craignoit rien : il avoit morgué le grand- maître, en cajolant madame de Chalais sous sa moustache. C’étoit un homme froid. Il avoit une galère, et après avoir fait des merveilles au combat qui se donna auprès de Gênes, à la naissance de M. le dauphin, où il fit des protestations contre le Pont-de-Courlay qui ne vouloit pas donner, il reçut un coup de mousquet dans le visage qui le défiguroit tout. Il ne voulut plus vivre, et ne souffrît pas qu’on le pansât.
Madame de La Flotte, veuve d’un des MM. du Bellay, chargée d’affaires et d’enfants, s’offrit, quoique ce fût un emploi