Page:Tallemant des Réaux - Historiettes, Mercure de France, 1906.djvu/314

Cette page n’a pas encore été corrigée

Conviée à un bal, elle emprunta un collet ; il lui étoit trop court : « Voilà bien de quoi s’embarrasser, dit-elle, ne sais-je pas allonger des vers ? j’allongerai bien ce collet. » Elle y mit du ruban noir tout autour. Cela étoit épouvantable. Ma sœur de Ruvigny dit : .« Voilà un ajustement bien poétique ! . »

Pour faire voir sa cervelle, il ne faut que ce madrigal. J’en dirai auparavant le sujet. L’abbé Parfait, conseiller au Parlement, étoit allé chez elle pour la première fois ; elle avoit été saignée. Justement, comme il entroit, elle eut une foiblesse, et pensa tomber : il la soutint. Le lendemain, elle lui envoya ce madrigal au Palais, dans sa chambre, afin que plus de monde le vît :

Madrigal


Quoi ! Tircis, bien loin de m’abattre,

Vous m’empêchez de succomber !

Quoi ! vous me relevez lorsque je veux tomber,

Et vous prêtez des bras pour vous combattre !

Après cette belle action,

On verra votre nom au Temple de Mémoire,

Et l’on vous nommera le héros de ma gloire,

Mais aussi le bourreau de votre passion.


Il n’y a pas une plus grande menteuse au monde, ni une plus grande étourdie : elle a fait, dit-elle, un roman. même elle en a traité avec je ne sais quel libraire. On lui demande : « Où est le plan de votre roman  ? — Je ne sais s’il y en a, répondit-elle, mais, s’il y en a un, il faut qu’il soit dans