Boileau avait cru que la littérature française commençait à Malherbe ; les professeurs, qui narguaient le romantisme, commençaient à croire que la société française n’avait perdu sa virginité qu’à la mort du Grand roi.
Saint-Simon, cependant, avait renfoncé beaucoup d’illusions. Tallemant des Réaux, qu’il fallut bien accepter enfin, acheva la déroute des moralistes. D’aucuns imaginèrent d’accorder aussi quelque créance à Brantôme, et l’on découvrit alors, non sans quelque surprise : que les mœurs ne changent jamais ; que les hommes — et les femmes, donc ! — sont toujours les mêmes ; que les époques soupçonnées de vertu sont celles dont on ignore provisoirement l’histoire secrète.
On ne soupçonnera plus de vertu les contemporains de Louis XIII. Des Réaux y a mis bon ordre [1].
Né à La Rochelle vers 1619, Gédéon Tallemant, seigneur des Réaux, mourut à Paris le 10 novembre 1692. Il n’exerça aucune charge. D’une famille de financiers, allié à la robe et à l’épée, des Réaux fut du monde et de tous les mondes, ici et là très estimé et vanté. Il entrait partout, à la cour, à la ville, au palais, à l’église, au temple et au mauvais lieu, aisé partout, l’oreille aux aguets, comprenant tout, écrivant sur des registres tout ce qu’il avait compris et le
- ↑ On l’appela toujours ainsi de son vivant, M. Des Réaux.« L’illustre M. des Réaux » dit un contemporain.