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Le vent du nord souffle froid et triste ; le contraste est étrange, quand on regarde la gloire du ciel, où le soleil luit dans sa force, et le délicieux azur dans lequel se perdent les teintes du lointain. L’Apennin est franchi, et les collines modérées, les riches plaines bien encadrées commencent à se déployer et à s’ordonner comme sur l’autre versant. Çà et là une ville en tas sur une montagne, sorte de môle arrondi, est un ornement du paysage, comme on en trouve dans les tableaux de Poussin et de Claude. C’est l’Apennin, avec ses bandes de contre-forts allongés dans une péninsule étroite, qui donne à tout le paysage italien son caractère ; point de longs fleuves ni de grandes plaines : des vallées limitées, de nobles formes, beaucoup de roc et beaucoup de soleil, les aliments et les sensations correspondantes ; combien de traits de l’individu et de l’histoire imprimés par ce caractère !



Pérouse, 3 avril.


C’est une vieille ville du moyen âge, ville de défense et de refuge, posée sur un plateau escarpé, d’où toute la vallée se découvre. Des portions de mur sont antiques ; plusieurs fondations de portes sont étrusques ; l’âge féodal y a mis ses tours et ses bastions. La plupart des rues sont en pente, et des passages voûtés y font des défilés sombres. Souvent une maison enjambe la rue ; le premier étage va se continuer dans celui qui fait face ; de grandes murailles de briques roussies, sans fenêtres, semblent des restes de forteresses.

Vingt débris y mettent devant l’imagination la cité