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justice. — Nous aussi, nous avons vu les nobles émigrer avec le roi, et plus tard bouder dans leurs terres. — C’est ici la petite édition d’un grand livre ; mais le nouveau volume n’est pas encore cousu, les feuilles tiennent mal ensemble, il lui faudra comme au nôtre, pour acquérir de la consistance, dix ans de froissement sous un lourd pilon, j’entends sous la crainte de l’étranger.



Soirée avec des magistrats, des professeurs et des gens de lettres.


La plus grande difficulté ici, pour le gouvernement, vient du grand nombre de privilégiés nourris par les Bourbons, et qui maintenant sont sans place. Par exemple, il y avait une grande manufacture d’ouvrages en fer qui coûtait deux millions par an : elle ne produisait rien ; peu à peu, les ouvriers avaient été remplacés par des fils d’officiers ou d’employés qui touchaient cinq francs par jour, tel à titre d’ouvrier serrurier, tel comme contre-maître ; ils ne venaient qu’à la fin du mois, et pour recevoir la paye ; un petit nombre faisaient acte de présence dans les bureaux, de onze heures à trois. La révolution arrive, on cesse de les payer. Ils crient, on les paye. On trouve alors la manufacture trop coûteuse, et on la met en adjudication ; personne ne se présente. À la fin, un spéculateur hardi l’accepte pour dix ans et convient de payer par an 48,000 ducats de location. Ce nouveau fermier fait venir les employés et les prétendus ouvriers. « Je vous payerai comme autrefois, mais vous travaillerez la journée complète. » — Cris et réclamations. — « Alors travaillez le temps qu’il