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difficiles, de courir des lances, de jouter, qu’il soit en cela un des meilleurs parmi les Italiens… Pour les tournois, les pas d’armes, les courses entre barrières, qu’il soit un des bons parmi les meilleurs Français… Pour jouer aux bâtons, courir le taureau, lancer des dards et des lances, qu’il soit excellent parmi les Espagnols. Il convient encore qu’il sache sauter et courir… Un autre exercice noble est le jeu de paume. Et je n’estime pas à moindre mérite de savoir faire la voltige à cheval. » Ce n’était pas là de simples préceptes relégués dans la conversation et dans les livres ; les actions et les mœurs y étaient conformes. Julien de Médicis, qui fut assassiné par les Pazzi, est loué par son biographe non-seulement pour son talent de poëte et son tact de connaisseur, mais encore pour son habileté à manier le cheval, à lutter et à jeter la lance. César Borgia, le grand politique, est aussi exercé aux coups de main qu’aux intrigues. « Il a vingt-sept ans, dit un contemporain, il est très-beau de corps et grand, et le pape son père a grand’peur de lui. Il a tué six taureaux sauvages en combattant à cheval avec la pique, et à l’un de ces taureaux il a fendu la tête du premier coup. » C’est l’Italie en ce moment qui fournit l’Europe de savants maîtres d’armes, et dans les estampes du temps on voit l’élève nu, un poignard dans une main, une épée dans l’autre, qui du jarret à la nuque prépare et assouplit ses muscles comme un athlète et comme un lutteur.

Il le faut bien, la paix publique est trop mal gardée. « Le 20 septembre, dit un chroniqueur, il y eut un grand tumulte dans la ville de Rome, et tous les marchands fermèrent leurs boutiques. Ceux qui étaient aux champs ou dans leurs vignes revinrent en toute hâte, et