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des faits ; ils se vengent de leur ancien esclavage.

Point de bons journaux ; la mode des gazettes à un sou s’est établie, et la rédaction est à l’avenant. Ils sautent le matin sur les nouvelles télégraphiques, et veulent les voir appuyées par une grosse tirade. C’est aussi à ce point de vue qu’ils jugent nos journaux français ; ils ne goûtent pas l’éloquence modérée, le style contenu, la fine ironie de M. Prévost-Paradol ; ils préfèrent de beaucoup les premiers-Paris des journaux démocratiques. Rappelons-nous nos propres gazettes de 89, leurs déclamations, leurs gros mots et leur rhétorique vide.

Hier, en déjeunant au café, je trouve dans un journal d’un sou un feuilleton singulier, la quatrième leçon du professeur Ferrari sur la Philosophie de l’histoire ; il expose les idées de Giannone, ses recherches précoces en matière d’histoire religieuse ; selon Giannone, les premiers chrétiens n’ont point cru au paradis ; leur dogme fondamental était la résurrection des corps ; jusqu’à la résurrection les morts demeuraient dans une sorte d’inertie et d’expectative ; peu à peu la théologie se développant met à part les morts fidèles ; bientôt saint Augustin leur accorde une demi-béatitude préalable ; sous le pape saint Grégoire, ils montent droit au ciel. — Il est évident que de pareilles idées aussi librement exposées et aussi largement popularisées doivent faire un grand effet.

Le collège des jésuites est maintenant sous l’invocation de Victor-Emmanuel. Dans la rue, on rencontre les écoliers de divers établissements conduits, non plus par un prêtre, mais par un sergent. C’est sur cette transformation et sur l’accroissement de l’éducation publique qu’ils fondent leurs meilleures