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PHILOSOPHIE DE L’ART.

d’une lête, comme celui d’un palais, change sans beaucoup de peine ; on peut, sans toucher au palais, y mettre d’autres tentures, d’autres buffets, d’autres bronzes, d’autres tapis ; pareillement, sans toucher à la structure intérieure d’une âme, on peut y mettre d’autres idées ; un changement de condition ou d’éducation y suffit : selon que l’homme est ignorant ou lettré, plébéien ou noble, ses idées sont différentes. — Il y a donc en lui quelque chose de plus important que les idées, c’est sa charpente même, je veux dire son caractère, en d’autres termes, ses instincts naturels, ses passions primordiales, la grandeur de sa sensibilité, le degré de son énergie, bref, la force et la direction de son ressort intérieur. Pour vous faire voir cette structure profonde des âmes italiennes, je vais vous montrer les circonstances, les habitudes, les besoins qui l’ont produite : vous la comprendrez mieux par son histoire que par sa définition.

Le premier trait qu’on remarque alors en Italie, c’est le manque d’une paix ancienne et stable, d’une justice exacte, et d’une police surveillante comme celle à laquelle nous sommes habitués chez nous. Nous avons quelque peine à nous représenter cet excès d’anxiété, de désordres et de violences. Nous sommes depuis trop longtemps dans l’état contraire. Nous avons tant de gendar-