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quer, le tirer, le pousser, » y créer des modifications et des formes nouvelles. C’est là de la philosophie fantastique. Quand un corps en choque un autre, il y a simplement rapprochement, mouvement, et nécessité d’un mouvement. Lorsque la résolution contracte le muscle, il y a simplement résolution, contraction et nécessité de la contraction. Quant au mot nécessaire, rien de plus clair : il signifie ce dont le contraire est absurde. Par exemple, il serait absurde ou contradictoire que la résolution ayant contracté le muscle une première fois, elle ne pût le contracter une seconde fois, toutes les circonstances étant exactement semblables. Il serait absurde que la vapeur d’eau ayant poussé le piston une première fois, elle ne pût le pousser une seconde fois, toutes les conditions étant exactement les mêmes. Il serait absurde qu’une loi de la nature étant donnée, cette loi fût démentie. Il n’y a dans le monde que des faits et des rapports nécessaires ; quand on transforme ces relations et ces nécessités en petits êtres, on fabrique des entités à la façon des scolastiques ; on voit quelque chose de vague et d’abstrait qu’on déclare spirituel ; on finit par soutenir que le monde réel n’est qu’une apparence. On s’infatue de ces monades chimériques jusqu’à en peupler l’univers. On devient un homme du moyen âge. On a commencé, avec Duns Scot, par métamorphoser les