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paux qui composent la vie de chacun d’eux, et que je les jugeais nécessaires. Ayant considéré le génie d’un poëte, d’un politique, d’un savant, j’ai trouvé que ce nom m’apparaissait lorsque j’apercevais l’action principale de leur vie, avec les facultés et les inclinations qui les y portaient. J’ait fait de même pour les autres. Dans tous les cas, j’ai recréé mon idée, en reproduisant la circonstance particulière qui l’a fait naître ; j’ai démêlé cette circonstance en la rendant sensible ; je l’ai rendue sensible en la grossissant ; et je l’ai grossie en la répétant plusieurs fois.

Voilà le premier pas de l’analyse. Nous avons traduit chaque mot par un fait douteux ou non, complet ou non. Nous n’opérons plus sur des mots vides, mais sur les choses ; si nous n’avons pas accru les faits que nous savions, nous avons contrôlé les termes dont nous usions ; si nous n’avons pas beaucoup diminué notre ignorance, nous avons beaucoup diminué nos erreurs ; nous avons refait toutes nos idées, et nous avons refondu notre esprit. Et pour cela, nous avons pris un moyen simple : nous avons ramené les noms compliqués et généraux aux cas particuliers et singuliers qui les suscitent ; en réunissant plusieurs exemples, nous avons démêlé et détaché la circonstance commune qu’ils désignent ; nous les avons réduits à exprimer cette circonstance. Aussitôt les êtres mé-