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bientôt l’éclectisme d’une moisson de fleurs ; ce fut un jardin après un souterrain. — Mais le jardin était étroit ; Platon n’avait fait qu’indiquer le monde idéal ; ses dialogues semblaient un préambule plutôt qu’un voyage ; d’ailleurs son principal ouvrage, le Parménide, paraissait inintelligible. On se lança dans le prodigieux univers de Proclus, mosaïque de triades, où la subtilité athénienne décompose et classe les illuminations du mysticisme oriental. — Cependant tout cela était étranger, et laissait un mécontentement secret. On avait renversé nos derniers philosophes français, et l’on avait besoin d’une gloire nationale. On releva Descartes, et le public apprit avec joie que toutes les grandes vérités philosophiques avaient été prouvées pour la première fois par un compatriote. — Mais Descartes était mort depuis deux siècles, et deux siècles sont beaucoup ; on aurait voulu quelque chose de plus moderne, de plus approprié aux sciences nouvelles, de plus frappant, de plus grandiose, de plus attrayant. On eut recours à Schelling et à Hégel ; on emprunta à l’un le fini, l’infini et leur rapport ; à l’autre, une philosophie de l’histoire et une histoire de la philosophie, et l’on eut les leçons inspirées de 1828. Qui nommerai-je encore ? Le nom de M. Cousin est légion ; ainsi possédé, l’on comprend qu’il ait possédé le public. Je n’ai point rangé ses variations selon les dates ;