Page:Taine - Les Philosophes classiques du XIXe siècle en France, 1868.djvu/287

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

même. « Il y a aux yeux de la raison une équation parfaite, absolue, nécessaire, entre l’idée de fin et l’idée de bien, équation qu’elle ne peut pas ne pas concevoir dès que le principe de finalité lui est apparu[1]. »

Puisque la fin est le bien, la fin absolue de la création est le bien absolu ; or, ce bien nous apparaît comme sacré ou obligatoire. Et comme la fin de chaque être particulier est un élément de la fin absolue, le bien de chaque être particulier est un élément du bien absolu ; il est donc sacré et obligatoire. En d’autres termes, il est de notre devoir de respecter la fin ou le bien des autres et le nôtre, et d’y aider.

Puisque la nature d’un être est appropriée à sa destinée et l’indique, la nature de l’homme est appropriée à sa destinée et l’indique. Or, en étudiant la nature, c’est-à-dire les tendances fondamentales de l’homme, on s’aperçoit qu’elle ne peut être satisfaite en ce monde, et, par exemple, atteindre la plénitude de la science, de l’activité, du bonheur. Donc elle n’a pas pour fin en ce monde cette satisfaction et cette plénitude ; car il serait absurde qu’une fin lui fût proposée et qu’elle ne pût l’atteindre. Donc elle a pour fin ce qui est uniquement en son pouvoir, et ce que, par elle

  1. 29e leçon, p. 126.