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LE RÉGIME MODERNE


« des ordres ou des avis pour changer le plafond de votre chambre, vous devez les attendre ; et si, Milan étant en feu, vous lui en demandiez pour l’éteindre, il faudrait laisser brûler Milan et attendre les ordres… Sa Majesté est mécontente et très mécontente de vous ; vous ne devez jamais faire ce qui lui appartient ; elle ne le voudra jamais ; elle ne le pardonnera jamais. » — Jugez par là de son ton avec les sous-ordres : à propos des bataillons français à qui l’on a refusé l’entrée des places hollandaises[1] : « Déclarez au roi de Hollande que, si ses ministres ont agi de leur chef, je les ferai arrêter et leur ferai couper la tête à tous. » — À M. de Ségur[2], membre de la commission académique qui vient d’agréer le discours de M. de Chateaubriand : « Vous et M. de Fontanes, comme conseiller d’État et grand-maître, vous mériteriez que je vous misse à Vincennes… Dites à la seconde classe de l’Institut que je ne veux pas qu’on traite de politique dans ses séances… Si elle désobéit, je la casserai comme un mauvais club. » — Même quand il n’est pas en colère et grondant[3], lorsqu’il rentre les

  1. Lettre de Napoléon à Fouché, 3 mars 1810. (Omise dans la Correspondance de Napoléon Ier et publiée par M. Thiers, Histoire du Consulat et de l’Empire, XII, 115.)
  2. Ségur, III, 459.
  3. Paroles de Napoléon à Marmont qui, après trois mois d’hôpital, lui revient d’Espagne avec un bras fracassé et son reste de main dans une manche noire : « Vous tenez donc bien à cette loque ? » — Sainte-Beuve, qui a le goût de la vérité vraie, donne le texte cru que Marmont n’a osé reproduire. (Causeries du lundi, VI, 16.) — Souvenirs inédits du chancelier Pasquier. M. de Champagny ayant été renvoyé et remplacé, un ami courageux le défendait