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LES GOUVERNANTS


« faits de la nation sur ceux qui partagent leurs principes, à procurer asile et secours à beaucoup de prévenus que la justice poursuit et qui se disent patriotes par excellence[1], enfin à recevoir des contributions des maisons de débauche et de jeu ». — Dans les campagnes, les anciennes bandes, « les hordes de brigands sans patrie », qui ont si bien travaillé pendant l’anarchie de la Constituante et de la Législative, se reforment pendant l’anarchie du Directoire ; on les voit aux environs d’Apt, « commencer par de petits vols, puis, forts de l’impunité et de leur titre de sans-culottes, enfoncer les granges, les voler, massacrer les propriétaires, dévaliser les voyageurs, rançonner tout ce qui se trouve sur leur chemin, forcer et piller les maisons dans la commune de Gordes, arrêter les femmes dans la rue, leur arracher leurs bagues et leurs croix, attaquer l’hôpital, le saccager de fond en comble » ; et leurs pareils,

  1. Archives nationales, F7, 7171 : « (Les commissaires de quartier) avertissent les exclusifs et même les escrocs, lorsqu’on veut mettre à exécution les mandats décernés contre eux… Ce qui s’est pratiqué dans les assemblées primaires, le 1er  thermidor dernier, pour l’élection des officiers municipaux, avait été fait avec succès pour l’organisation de la garde nationale : menaces, injures, vociférations, voies de fait, abandon forcé des assemblées que dirigèrent alors les amnistiés, enfin nomination de ces derniers aux places principales. En effet, toutes, à commencer par celles du chef de bataillon jusqu’à celles des caporaux, sont exclusivement occupées par les gens du parti exclusif. Il résulte de là que les gens probes, répugnant à faire ce service avec des hommes qu’ils ne peuvent voir sans un souvenir révoltant, payent leur garde au lieu de la monter, et que la sûreté de la ville est entre les mains de ceux qu’il faudrait surveiller. »