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LES GOUVERNANTS


« même, en thermidor an II, des agents de la municipalité apposent des cachets sans caractère, des boutons et même des gros sous, en sorte que quiconque est muni d’un sou peut, à son gré, lever et réapposer les scellés » ; le tour fait, « pour colorer leurs vols, ils substituent des cailloux taillés, des pierres fausses aux véritables ». Enfin, aux enchères, « lorsqu’ils redoutent la probité ou la concurrence des gens instruits, ils (leur) offrent de l’argent pour les engager à se retirer des ventes ; on en cite une, où ils assommèrent un enchérisseur ». Cependant, le soir, ils crient de tous leurs poumons au club ; cela, avec la protection d’un membre de la municipalité ou du comité révolutionnaire, les met à l’abri de tout soupçon. Quant au protecteur, il sait toucher sa part, sans sortir de l’ombre : accusez, si vous en avez l’audace, le fonctionnaire républicain qui, en secret ou même ostensiblement, bénéficie de ces larcins ; il vous montrera ses mains nettes. — Ainsi fait le patriote incorruptible que les représentants ont trouvé seul de son espèce à Strasbourg et que, d’office, ils ont nommé maire. Le 10 vendémiaire an III[1], on découvre « dans ses appartements » un assortiment magnifique et complet d’objets ecclésiastiques, « 49 chapes et chasubles de soie ou de satin, « galonnées d’or ou d’argent, 54 palles galonnées », quantité de « reliquaires, de burettes, de cuillers, d’encen-

  1. Recueil de pièces authentiques sur la Révolution à Strasbourg, II, 1 (Procès-verbal dressé en présence de Monet père, et signé par lui).