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LA RÉVOLUTION


d’eux siègent « un marchand de chevaux, sans moyens, plus propre au maquignonnage qu’à l’administration, ivrogne d’ailleurs ; un teinturier, sans aucun jugement, capable de recevoir toutes les impulsions, mis en avant par la faction jacobine, et ayant exercé, plutôt peut-être par ignorance que par cruauté, des actes du plus grand arbitraire ; un cordonnier, sans lumières, ne sachant que signer son nom, » et d’autres semblables. Au tribunal, on note un juge, « honnête dans le principe, mais que la misère et le défaut de fortune ont plongé dans tous les excès, changeant de caractère avec les circonstances pour avoir une place, associé aux meneurs pour la garder, cependant ayant l’âme sensible et n’ayant peut-être commis tous ses crimes que pour se conserver une existence ainsi qu’à sa famille ». Dans la municipalité, la majorité se compose d’incapables, les uns ouvriers fileurs ou retordeurs, les autres revendeurs ou petits boutiquiers, « ineptes », « sans moyens » ; parmi eux, quelques cerveaux dérangés : celui-ci, « tête désorganisée, absolument nul, anarchiste et Jacobin » ; celui-là, « homme très dangereux par défaut de jugement, Jacobin exalté » ; un troisième, « agent de la tyrannie, homme de sang, capable de tous les vices, ayant pris le nom de Mutius Scévola, d’une immoralité reconnue, et ne sachant pas écrire ». — Pareillement dans les districts de l’Aube[1]

  1. Archives nationales, D, § I, 5. Arrêtés d’Albert, 29 pluviôse et 5 ventôse an III, pour réorganiser les tribunaux et les administrations dans les districts de Nogent-sur-Seine, Ervy, Arcis, avec tableau nominatif des révoqués et des motifs de révocation.