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LA FIN DU GOUVERNEMENT RÉVOLUTIONNAIRE


« blicaine qui opère légalement doit l’emporter sur une majorité influencée par le royalisme[1] ». Aux jours d’élection, on verra le gouvernement « lancer dans chaque département ses agents commissaires », contraindre les suffrages « par des menaces, des promesses et tous les genres de séduction », faire « arrêter des électeurs et des présidents d’assemblée primaire[2] », frapper même sur des Jacobins récalcitrants, invalider les choix d’une majorité s’ils lui déplaisent, valider les choix d’une minorité s’ils lui conviennent, en d’autres termes se faire le grand électeur de toutes les autorités centrales ou locales. — Bref, institutions, lois, droit public, droit privé, tout est à bas, et la nation, corps et biens, redevient, comme sous Robespierre, la propriété de ses gouvernants, avec cette seule différence que les rois de la Terreur, ajournant leur Constitution, proclamaient franchement leur omnipotence, tandis que

    pas passé deux cents votants. » — Sauzay, IX, ch. lxxxiii (Sur les élections de 1798 à Besançon, notes d’un témoin), 499 : « Des Jacobins furent élus par un brigandage des plus affreux. Soutenus par la garnison, à qui ils avaient distribué beaucoup de vin, leur élection fut faite sous les baïonnettes, et à coups de sabre et de bâton. Il y eut beaucoup de catholiques blessés. »

  1. Albert Babeau, II, 444 (Déclaration de la minorité patriote et scissionnaire du canton de Rigny, aux élections de l’an VI).
  2. Mercure britannique, n° du 25 août 1799 (Rapport lu le 15 juillet et le 5 août, aux Cinq-Cents, sur la conduite des directeurs Reubell, La Révellière de Lépeaux, Merlin de Douai, Treilhard, et résumé des neuf chefs d’accusation). — Ib., 3e chef : « Ils ont violé notre Constitution, en usurpant la puissance législative par des arrêtés qui ordonnent que telle loi sera exécutée en tout ce qui ne sera pas modifié par le présent arrêté, et en rendant des arrêtés qui modifiaient ou rendaient illusoires ces mêmes lois. »