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LA RÉVOLUTION


qui, détendu après le 9 Thermidor, mais restauré après le 13 Vendémiaire, s’est prolongé jusqu’à l’heure présente par l’application de ses lois les plus odieuses et par le maintien de ses plus scandaleux agents ; rien de plus. — On ne trouverait pas, dans les deux Conseils, vingt royalistes avoués ou décidés[1] ; il n’y en a guère que cinq ou six, Imbert-Colomès, Pichegru, Willot, Delarue, qui soient en correspondance avec Louis XVIII et disposés à relever le drapeau blanc. Dans les espérances, même secrètes, des cinq cents autres, la restauration du roi légitime, l’établissement d’une royauté quelconque, ne vient qu’au second plan ; ils ne l’aperçoivent qu’à distance, comme un complément possible, comme une conséquence incertaine et future de leur entreprise présente. En tout cas, ils n’accepteraient que « la monarchie mitigée », celle que souhaitaient les libéraux de 1788, celle que réclamait Mounier après les journées du 5 et du 6 octobre, celle que soutenait Barnave après le retour de Varennes, celle que Malouet, Gouverneur Morris, Mallet du Pan, les bons observateurs et les vrais connaisseurs de la France, ont toujours recommandée[2]. Aucun d’eux ne se propose de proclamer le droit divin et de restaurer la féodalité nobiliaire ; chacun d’eux se propose d’abroger le droit révolutionnaire et de détruire la féodalité jacobine. Ce qu’ils condamnent en principe,

  1. Carnot, Mémoires, II, 108 : « Pas quinze meneurs. » — Lacretelle, Dix années d’épreuves, 308 : « Vingt ou trente hommes voués à des opinions monarchiques, mais qui n’osaient les déclarer publiquement. »
  2. Mallet du Pan, II, 267, 278, 331,