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LES GOUVERNÉS


maintenue à une livre et demie pour les 324 000 travailleurs, est abaissée pour les autres à une livre ; en fait, plusieurs ne reçoivent rien, beaucoup une demi-livre, un quart de livre. Germinal s’ouvre, et le Comité de Salut public, qui voit ses magasins se vider, limite toutes les rations à un quart de livre. Là-dessus, le 12 germinal, grande émeute des ouvriers et des femmes ; la Convention, envahie, est délivrée par la force armée, Paris est déclaré en état de siège, et le gouvernement, remis en selle, serre la bride. Dorénavant[1], en fait de viande, tous les 5 ou 10 jours, un quart de livre ; en fait de pain, 4 onces par jour en moyenne, quelquefois 5, 6 ou 7 onces, de loin en loin 8 onces, souvent 3 onces, 2 onces, 1 once 1/2, ou même rien du tout ; et le pain, noir, « malfaisant », devient de plus en plus mauvais et détestable. Les gens aisés vivent de pommes de terre ; mais il n’y en a que pour les gens aisés, car, au milieu de germinal, elles sont à 15 francs le boisseau, vers la fin de germinal à 20 francs, vers la fin de messidor à 45 francs, dans les premiers mois du Directoire à 180 francs, puis à 224 francs, et les autres denrées montent de même. — Depuis l’abolition du maximum, le mal vient, non plus du manque de vivres, mais de la cherté des vivres : les boutiques sont garnies ;

  1. Schmidt, Tableaux de Paris (Rapports du 15 germinal, du 29 germinal, du 28 messidor an III, du 23 brumaire et du 14 frimaire an IV). — Ib. (15 germinal an III), le beurre 8 francs la livre, les œufs 7 francs le quarteron. — Ib. (9 messidor), le pain à 16 francs la livre ; (28 messidor), le beurre à 14 francs la livre ; (29 brumaire an IV), le sac de farine de 325 livres à 14 000 francs.