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LA RÉVOLUTION


alimenter la capitale ; c’est qu’il y siège, et qu’un degré ajouté à la disette de Paris le jetterait à bas. Chaque semaine, en lisant les rapports quotidiens de ses agents[1], il sent qu’il est sur le point de sauter ; deux fois, en germinal et prairial an III, une explosion populaire le renverse pendant quelques heures, et, s’il se soutient, c’est à condition de donner aux nécessiteux un morceau de pain ou l’espoir d’un morceau de pain. À cet effet, postes militaires échelonnés autour de Paris jusqu’à dix-huit lieues en avant sur les routes ; patrouilles permanentes et en correspondance réciproque, pour hâter les charretiers et requérir sur place des chevaux de renfort ; escortes expédiées de Paris au-devant des convois[2] ; réquisition de « toutes les voitures et de tous les chevaux quelconques pour opérer le transport, de préférence à tous travaux et à tous services » ; ordre à toutes les communes traversées par un grand chemin d’apporter des décombres ou du fumier dans les pas difficiles et de répandre sur tout le parcours une couche de terre, pour que les chevaux puissent marcher malgré le verglas ; ordre aux agents nationaux de requérir le nombre d’ouvriers nécessaire pour briser la glace autour des moulins à eau[3] ; réquisition de « toute l’orge

    lement, il trouve une douzaine de vieux petits biscuits de Savoie qu’il paye 15 francs. — Sur les procédés militaires du gouvernement à propos des subsistances, voir les arrêtés du Comité de Salut public, la plupart de la main de Lindet, AF, II, 68 à 74.

  1. Schmidt, Tableaux de Paris, tomes II et III, passim.
  2. Archives nationales, AF, II, 68 (Arrêtés du 20 ventôse an III, du 19 germinal, du 20 germinal, du 8 messidor, etc.).
  3. Ib. Arrêtés du 5 et du 22 nivôse an III.