Page:Taine - Les Origines de la France contemporaine, t. 8, 1904.djvu/293

Cette page a été validée par deux contributeurs.
289
LES GOUVERNÉS


du district sont « dans une position à peu près égale ». — Même spectacle dans toute l’Île-de-France, dans toute la Normandie, dans toute la Picardie. Autour de Dieppe, dans la campagne[1], « des communes entières se nourrissent d’herbes et de son »…… — « Citoyens représentants, écrivent les administrateurs, nous ne pouvons plus y tenir ; nos concitoyens nous reprochent de les avoir dépouillés de tous leurs grains en faveur des grandes communes. » — « Tous nos moyens de subsistance sont épuisés, écrit le district de Louviers[2] ; on est réduit ici, depuis plus d’un mois, à manger du pain de son et d’herbes bouillies, et cette nourriture grossière devient elle-même très rare. Considérez que nous avons 71 000 administrés qui en ce moment sont en proie aux plus grandes horreurs de la disette, et qu’il en a péri déjà un grand nombre, les uns de faim, les autres des maladies occasionnées par les mauvais aliments dont ils se nourrissent. » — Dans le district de Caen[3], « les pois verts, les pois à chevaux, les fèves, les orges hâtives, les seigles sont attaqués » ; les mères et les enfants se jettent dessus, en

  1. Archives nationales, AF, II, 73 (Lettre du directoire du district de Dieppe, 21 prairial).
  2. Ib. (Lettre des administrateurs du district de Louviers, 26 prairial).
  3. Ib. (Lettre du procureur-syndic du district de Caen, 23 messidor. — Lettre du représentant Porcher au Comité de Salut public, 26 messidor. — Lettre du même, 24 prairial) : « La situation de ce département (le Calvados) m’a semblé affreuse… La détresse de ce département en fait de subsistances ne peut vous être exagérée ; le mal est à son comble. »


  la révolution, vi.
T. VIII. — 19